mardi 8 février 2011

La veuve noire

Rue de la Citadelle, Saint-Jean-Pied-de-Port, France
(photo : André Lebeau)
Enfin! Après ce long préambule de onze billets pour vous raconter la genèse et la préparation de notre voyage, nous voici enfin à Saint-Jean-Pied-de-Port.

Départ de Montréal le vendredi 19 mai à 18 h, 7 heures de vol, 6 heures de décalage, arrivée à Biarritz le samedi 20 mai à 7 h. Au comptoir d’information de l’aéroport, nous demandons comment nous rendre à Saint-Jean-Pied-de-Port. En ce samedi ensoleillé, deux options s’offrent à nous : 1. l’autobus jusqu’à Bayonne, puis le train jusqu’à notre destination finale. Seul petit hic, nous n’arriverons pas à destination avant 16 h ou 17 h, alors que nous comptions arriver plus tôt et nous reposer, après une nuit presque sans sommeil dans l’avion, en prévision de la traversée des Pyrénées le lendemain matin, une étape réputée difficile. 2. « Combien coûte le trajet en taxi? » demandons-nous. « Difficile à dire, mais certainement pas moins de cent z’euros ». J’ai souri intérieurement. Une Française faisait la même erreur que la majorité des Québécois en ajoutant un s à cent.

Nous avons finalement attendu l’autobus pendant un peu plus d’une heure, en profitant du soleil qui nous fait tant défaut au Québec à cette période de l’année. Une fois arrivés à Bayonne, vers midi, nous achetons nos billets de train. Le prochain départ est prévu pour 15 h 30; nous avons deux ou trois heures devant nous. Sur une terrasse près de la gare, nous commandons deux cafés et deux sandwichs au… devinez quoi? Au jambon de Bayonne, bien sûr! Exotique et délicieux. Puis nous faisons quelques pas dans les environs. Denis est déjà venu en Europe à quelques reprises, mais c’est ma première fois. Je suis enchanté par la beauté de l’architecture. Denis me confirme que ça ressemble à Paris. Je suis dès lors amoureux de la France, d’un amour indéfectible, encore aujourd’hui : j’aime la France, j’aime les Français, j’aime les Françaises.

Denis a dormi dans le train, tandis que je mangeais le paysage des yeux durant l’heure ou l’heure et demie qu’a duré le trajet : un teuf-teuf ferroviaire qui roule à la vitesse d’un chauffeur du dimanche en s’arrêtant dans les neuf petites gares de village qui séparent Bayonne de Saint-Jean-Pied-de-Port. Charmant. Nous y voici enfin! Le chef de gare, aussi français que dans les plus beaux films mettant en vedette Fernandel, avec son képi et son accent, nous indique le chemin pour nous rendre à pied dans l’enceinte fortifiée de la vieille partie de la ville. Les pèlerins, il en a vu plus d’un et il sait vers où les diriger : l’accueil des pèlerins, 39 rue de la Citadelle.

On nous accueille avec le sourire et on nous demande d’où l’on vient. « De Montréal », répond-on avec notre accent bien de chez nous – en reconnaissant qu’ici, c’est nous qui en avons un. Il n’en fallait pas plus pour que notre hôte redouble d’intérêt à notre égard et clame à un confrère bénévole un peu plus loin : « Regarde, Maurice, nous avons de la grande visite du Québec, des cousins d’Amérique. » Sans blague, ces Français nous aiment, et ça se sent au premier abord. Il suffit que l’on parle pour que l’on nous aime – pour autant que l’on soit aimable, bien sûr.

Après nous avoir vendu notre « crédentiale » pour la modique somme de 1 €, notre carnet de pèlerin qui nous permettra d’être hébergés dans les refuges et d’obtenir notre accréditation de pèlerin de Compostelle, nos deux hôtes ont discuté pour nous trouver le meilleur gîte qui soit, comme si le fait d’être Québécois nous conférait un privilège. Il y avait bien quelques endroits où l’on aurait souhaité nous caser, mais ils affichaient déjà complet; nous arrivions relativement tard pour le choix des gîtes. Puis, comme s’il avait eu un éclair de génie, Maurice a dit : « Chez la veuve noire, qu’en dis-tu? » « Mais bien sûr! la veuve noire, c’est parfait pour eux. » Je ne savais plus si c’était un privilège ou une blague, voire un mauvais tour, mais nous avions hâte de nous reposer. Et puis, des bénévoles sur le Chemin de Compostelle ne pouvaient pas être mal intentionnés.

Et chez la veuve noire nous sommes allés!


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